Révèle le dysigner qui est en toi
en 6 étapes

La communication visuelle est omniprésente dans notre quotidien.

Nous sommes sans cesse sollicités par l’image : dans la rue par des affiches, dans nos magazines sous la forme d’annonces presse, sur nos smartphones entre deux vidéos ou encore à la télévision avec les spots publicitaires. Comme son nom l’indique, cette forme de communication est principalement visuelle. Elle emploie l’image au service d’un message pour capter l’attention, remettre en question ou encore susciter l’émotion dans le but de promouvoir, informer ou encore instruire. Elle joue avec les symboles, les formes, les couleurs mais aussi avec les mots.

Les mots jouent parfois un rôle important, en particulier lorsqu’ils composent un slogan ou une baseline. Dans une affiche, ils peuvent transmettre les détails importants d’un événement, sensibiliser les gens à prendre soin de l’environnement ou de leur santé, dans d’autres circonstances ils peuvent aussi être utilisés pour surprendre, choquer, ou bien faire rire. Ils sont écrits en gros ou en petit. Ils vont même parfois, jusqu’à être déformé pour avoir plus d’impact ou pour simuler un cri ou un son.

En résumé, la communication visuelle est un monde baigné d’images et de mots qui sollicitent autant la créativité que la rigueur des designers.

La dyslexie en quelques mots.

La dyslexie est un trouble mal connu et souvent mal compris, en particulier dans le monde professionnel. Il est parfois confondu avec d’autres troubles cognitifs spécifiques faisant partie de la même famille :

  • la dysorthographie (trouble de la lecture)
  • la dyspraxie (trouble neurologique de l’activité motrice)
  • la dysphasie (trouble du développement du langage orale)
  • la dyscalculie (trouble de la logique mathématique)
  • les troubles de l’attention.

Les deux seuls troubles qui concernent réellement le langage écrit sont la dyslexie et la dysorthographie.

On le résume souvent – à tort – à une difficulté à écrire correctement alors qu’il s’agit au départ d’une difficulté à lire. Le terme « Dys » regroupe ce que l’on appelle les Troubles Cognitifs Spécifiques ou troubles de l’apprentissage. La dyslexie est un trouble de la compréhension du langage écrit. Contrairement aux autres, les dyslexiques ont plus de difficultés à reconnaître la forme des mots et à déchiffrer les associations de lettres qui les composent. On appelle ça la “conscience phonologique”. Différent sur ce point, les dyslexique on un plus grand besoin de concentration et de ressources cognitives, comme l’attention ou le raisonnement par exemple, pour traiter l’information et encoder le langage écrit.

Communication visuelle et dyslexie

Les obligations de résultat d’une agence de communication ou d’un designer indépendant sont, certes, de proposer des solutions créatives abouties mais surtout exemptes de toute faute d’orthographe !

Que se passe-t-il lorsque l’on remarque une faute dans une campagne de publicité ?

  • La faute perturbe instantanément la lecture et focalise toute l’attention du public
  • Elle occulte littéralement le message qui passe au second plan
  • Le message devient risible et se retrouve totalement déformé
  • L’annonceur et l’agence à qui a été confié la mission perdent toute crédibilité

C’est pourquoi l’enjeux de l’orthographe est grand dans la communication pourtant visuelle. Chaque création doit faire l’objet d’un examen minutieux avant d’être envoyé au risque de perdre de l’argent en devant relancer en urgence une série d’impression, de perdre toute la crédibilité du message, voire pire, perdre la confiance de son client.

C’est dire la pression qui repose sur les épaules d’un graphiste, dyslexique de surcroît. Surtout qu’en agence il n’y a pas toujours un collègue correcteur/relecteur dont la seule fonction est de passer au peigne fin vos créations et, en freelance, c’est plutôt la loi de l’article 22, démerde toi comme tu peux.

Comment peut-on être dyslexique tout en étant un bon designer ?

Je me suis confrontée de plein fouet à cette problématique dès le début de mon alternance. Accusant le coup de la dure réalité du monde professionnel j’ai décidé de faire de ma plus grande crainte le sujet principal de mon mémoire de Bachelor : “Dyslexie et design graphique sont-ils compatibles ?”

Ce mémoire fut pour moi une véritable thérapie. Il m’a permis de prendre le recul nécessaire pour parvenir à m’affirmer en tant que Designer. Grâce à lui j’ai compris que mes compétences de créatif n’étaient pas remises en question et que grâce à mes efforts et à un vrai travail d’équipe, je pouvais prouver ma valeur.

Particulièrement concernée et en m’appuyant sur ma propre expérience, j’ai tenu à rédiger cet article pour vous partager une méthode – sorte de processus alliant actions et réflexions – afin de vous permettre de regagner confiance en vous et de travailler le plus confortablement possible, seul ou en équipe.

Révélez le créatif qui est en vous, en 6 étapes :

1. Acceptez votre différence

Le plus difficile c’est de s’accepter, tel que l’on est vraiment. Accepter que l’on pense et que l’on fonctionne différemment. Avec nos qualités et nos défauts. C’est une introspection longue mais passionnante qui met en lumière ce que l’on sait faire et ce que l’on ne sait pas faire.

Par exemple, on peut découvrir notre capacité à dessiner n’importe quoi sur demande, sur la base d’un simple souvenir ou en saisissant l’instant présent tout en étant incapable d’écrire mieux que son médecin. (Et pourtant cet homme sauve des vies)

On peut s’apercevoir que l’on est remarquablement créatifs, capable de créer n’importe quoi juste avec notre imagination mais que lorsqu’il s’agira de répondre à la question : combien font 8×4 ou 6×9 ? On répondra toujours à côté, et c’est ok !

Autre exemple, on peut se rendre compte que notre raisonnement mental, visuel et spatial, nous donne peut être une capacité que d’autres n’ont pas : Celle de pouvoir se mouvoir en 3D dans un espace pour comprendre tous les points de fuites d’une rue de village, les jeux d’ombres et de lumières du soleil couchant entre les arbres d’une forêt, les volumes d’un concept car et la mécanique des forces qui s’exercent sur elles, les mouvements d’un athlète en pleine action ou encore les différentes textures d’une corbeille de fruits. Paradoxalement, on essaiera d’accepter cet éternel doute sur l’orthographe du mot “professionnel” avec un seul “f” et deux “s” comme dans “fesses”. (Merci Madame Noyer, professeur principale de français de mon collège qui m’avait donnée ce procédé mnémotechnique d’une efficacité redoutable)

Cette première étape est donc un diagnostic crucial qu’il est nécessaire de faire pour être honnête avec soi-même. Pour nous ouvrir les yeux sur nos capacités et nos limites afin d’aborder avec plus de sérénité le processus qui suit.

2. Osez en parler 

Ce guide de 6 étapes est basé sur ma propre expérience au cours de laquelle j’ai pu mesurer les bénéfices de l’avoir extériorisé mais la décision d’informer vos employeurs ou vos collègues de vos difficultés de dys vous appartient. Que vous fassiez le choix de divulguer l’information ou de la garder secrète, le principal est que vous soyez à l’aise avec ça.

La honte et la peur du jugement vous poussent peut-être à garder ça pour vous alors que vous devriez trouver la force de communiquer et de sensibiliser votre entourage.

D’expérience, ce non-dit à été source de pression et de regrettable quiproquos. L’équipe dans laquelle vous évoluez, ignorant vos difficultés, ne peut pas comprendre les raisons de vos erreurs. Elle ne peut pas comprendre vos réactions ni votre méthodologie. Enfermé dans votre omission, vous ne vous sentez pas en mesure de leur expliquer vos actions et réactions, du coup vous subissez une double pression et la situation reste bloquée.

Se libérer du poids du secret c’est s’autoriser à aller de l’avant. C’est ici que l’exercice précédent d’énumération de vos capacités et de vos difficultés prend tout son sens. Vous maîtrisez vos capacités, vous maitrisez vos limites et vous êtes en mesure d’en parler avec aisance. Expliquez d’abord ce qu’est votre dyslexie, parlez clairement de vos difficultés et des outils qui vous aident déjà ou qui peuvent être mis en place pour vous aider. A mon sens, sensibiliser votre entourage c’est vous donner toutes les chances de recevoir leur soutien.

3. Penser votre organisation

La clé de la réussite professionnelle inclut la prise de mesure pour progresser et obtenir un soutien et des conseils auprès d’autres personnes. Pour cela il est nécessaire d’apprendre à vous connaître en profondeur afin de comprendre ce dont vous avez besoin afin d’adapter votre organisation. Soyez proactif car vous seuls connaissez votre raisonnement mieux que personne. Remettez en question votre façon de voir et de comprendre les choses qui vous entourent.

Posez-vous ces questions pour mieux vous cerner vous même :

  • Avez-vous des problèmes de mémorisation des consignes orales qui suggère de vous fournir les consignes par écrit ?
  • Avez-vous des difficultés de transcription qui suggèrent l’emploi d’un logiciel de reconnaissance vocale (dictée orale) ?
  • Avez-vous des problèmes de vue qui pourraient envisager l’utilité de plus gros caractères sur les documents internes ou l’intérêt d’un logiciel de synthèse vocale?
  • Avez-vous besoin de plus de temps pour travailler, d’adapter la vitesse des prises de briefs ou l’organisation interne du planning des dead lines?
  • Le bruit vous empêche-t-il de vous concentrer au point d’avoir besoin d’un endroit calme, propice à la réflexion ou d’un casque de réduction de bruit pour mieux vous concentrer temporairement en open space ?
  • Avez-vous des difficultés de compréhension qui nécessitent de répéter les informations ou de fournir par écrit des consignes orales ?
  • Avez-vous une mauvaise prise de notes, encourageant l’utilisation d’un enregistrement audio des échanges, la fourniture d’un compte rendu à la fin de chaque réunion ?
  • Avez-vous des difficultés en orthographe qui nécessite l’installation d’un logiciel de correction automatique professionnel ?
  • etc.

Cette étape vise à déterminer votre zone de confort afin de libérer votre potentiel en définissant un cadre de travail qui vous rassure pour vous permettre de travailler plus sereinement.

4. Choisissez les bons outils

Optimisez votre adaptation au travail en mettant en place les dispositifs qui vous aident à vous organiser, à lire et à écrire. Il n’y a pas de solutions ou d’outils miracle car, vous l’aurez compris, il s’agit d’une organisation sur-mesure, pensée par vous et pour vous. Ayez recours aux technologies pour accroître votre productivité. Si certains outils sont payants, d’autres sont gratuits. D’ailleurs, beaucoup de solutions sont de simples actions à mettre en place dans votre quotidien.

  • Vous êtes plutôt papier = utilisez des fiches et sortez vos stabilos.
  • Vous êtes plus à l’aise avec les écrans = procurez-vous un ordinateur ou une tablette numérique.
  • Vous avez des difficultées à vous organiser = faite vous une to do list structuré
  • Vous éprouvez de réelles difficultées avec le calcul mental = greffez-vous une calculette et ayez un carnet mémo contenant les méthodes de calculs récurrent
  • Vous avez des problèmes pour écrire = pensez aux dictées vocale ou aux logiciels gratuits de corrections orthographiques tel que Bonpatron et Reverso. Payant mais aussi plus performant je vous parle plus en détail du Logiciels Prolexis que j’utilise comme soutien quotidien dans un autre article.
  • Vous avez des difficultés à rédiger vos mails = Rédigez-vous un répertoire de modèles de mails type, et de courriers type qui pourront être réutilisés en changeant seulement certaines parties. Il vous fera gagner du temps et économiser des fautes.
  • Vous avez des difficultés de mémorisation des consignes orales = Demandez un brief écrit ou un compte rendu de réunion. En accord avec votre équipe ou votre interlocuteur, utilisez des outils de prise de son lors de réunions internes. Vous pourrez ainsi y revenir plus tard au calme et en détail.
  • Vous avez des problèmes de compréhension = poser des questions et faites répéter votre interlocuteur pour être certain d’avoir bien compris. Demandez-lui de reformuler si ce n’est toujours pas clair pour vous.

5. Faites marcher l’esprit d’équipe

Une fois que vous maitrisez votre mode de fonctionnement, définissez clairement le rôle de chacun au sein de votre équipe.

Si vous avez la chance d’en avoir un parmi vos collègues, faites confiance aux compétences du précieux correcteur-relecteur. Avec un tel sniper dans votre équipe, soyez certains qu’aucune faute ne lui passera sous le nez.

Appuyez-vous sur la solidarité et l’entraide au sein de votre équipe. Formez des alliances avec les personnes chez qui votre discours raisonne. Des personnes qui comprennent votre histoire et qui vous soutiennent. Ce sera parmis ces collègues ou parmis ces supérieurs là que vous obtiendrez le plus de soutien et parmi lesquels vous trouverez sans doute des volontaires prêt à vous relire.

6. Relativisez

La qualité de l’orthographe joue un rôle important en communication. Négligée, elle peut décrédibiliser un message, entraînant derrière elle railleries, mauvaise image et perte de confiance auprès du public. Ce rappel de la dure réalité ne doit pourtant pas alourdir votre fardeau.

Restez toujours vigilant et ne relâchez jamais vos efforts pour écrire et vous relire mais n’oubliez pas qu’une faute d’orthographe peut échapper en tout temps, à tout le monde et même au meilleur. Ce n’est pas une excuse, toutefois, rappelez-vous que vous n’êtes jamais seul à travailler sur un visuel.

En agence, vos créations sont passées en revue par vos collègues, et souvent validées par vos supérieurs. Elles passent même à plusieurs reprises sous les yeux de votre client et de ses propres supérieurs hiérarchiques lors des mises au points avant d’être validé par leur soins. Vos créations passent entre les mains de l’imprimeur qui pourrait être le dernier rempart à une fuite de coquille. Malgré toute cette chaîne vigilante, bien rodée et expérimentée, une faute peut toujours échapper à la vigilance de tous.

7. Bonus

Considérez votre dyslexie comme un atout. Brock et Fernette Eide, médecins spécialistes en neurologie et auteurs de “la force insoupçonnée des dyslexiques”, Ronald Davis Directeur du Dyslexia Correction Center et auteur du livre “le don de dyslexie” ou encore Sandra Todorovic É-dys-trice et fondatrice des éditions ZTL Zétoolu dans son interview Linkedin “Give me 5 : spécial dyslexie” s’accordent à dire que la dyslexie est un atout, une chance ou une compétence supplémentaire.

Par exemple, les dys se concentrent essentiellement sur le résultat plutôt que sur la méthode pour y arriver. Au sein d’une équipe confrontée à la même problématique, leur raisonnement, différent de celui des autres, permet de compléter les forces du groupe en abordant le problème sous un angle différent.

Depuis toujours, les dys mobilisent toutes leurs forces en prenant soin d’éviter leur faiblesses. Ils rencontrent quotidiennement des obstacles liés à leurs troubles et qu’ils doivent toujours contourner avec créativité. Leur force pratique et concrète les aident à acquérir de multiples connaissances comme la résolution de problèmes ou la proposition de nouvelles idées etc.

Pia Loro, architecte d’intérieur, artiste dessinatrice et intervenante en école d’art définit sa dys comme une “coquetterie” dans son interview. Quel que soit le nom que vous lui donnerez, prenez conscience que cette différence, avant d’être un ennemi, peut aussi devenir votre meilleur ami.

Je vous met à disposition quelques liens utiles :

Cet article vous a intéressé et vous souhaitez en lire davantage ?

Réagissez et partagez-nous votre expérience et vos outils !
Partagez-nous votre histoire et dites-nous comment vous vous organisez.
Faites entendre votre voix. #dysigner